Le gouvernement annonce, la logistique doit suivre. Une semaine après avoir été informés qu’ils recevraient principalement des doses du vaccin de Moderna plutôt que de celui de Pfizer, les référents de centres de vaccination doivent encore une fois changer leur fusil d’épaule dans l’urgence et l’impréparation.

« Pour l’instant on est pris de court. Depuis quatre ou cinq jours, on essaye de s’organiser mais on ne sait pas précisément combien de doses on aura pour chaque vaccin », souffle Alain Assouline, médecin référent du centre du Cresco à Saint-Mandé (Val-de-Marne). Alors qu’on lui promettait 70 % de livraisons Pfizer et 30 % de Moderna, il a finalement reçu sa livraison complète jeudi… et uniquement du Pfizer. « Je pense que même les agences régionales de santé [ARS, qui distribuent les dotations aux centres] ne le savent pas à l’avance », glisse le médecin, soulagé de ne pas devoir expliquer dès cette semaine à ses patients pourquoi ils reçoivent du Moderna alors qu’ils s’étaient inscrits pour du Pfizer. Même si le ministère de la santé s’est engagé à approvisionner ces rendez-vous manqués grâce au stock d’Etat, le professionnel se doute que certains usagers seront déçus.

Même situation au centre de vaccination de la mairie de Montreuil (Seine-Saint-Denis), où le mix 80 % de Moderna 20 % de Pfizer s’est transformé en 100 % Pfizer« Les gens ne comprennent plus rien. Et le problème c’est que personne ne veut de Moderna », se désole Pierre-Etienne Manuellan, le médecin référent. « Il faut une campagne nationale pour expliquer clairement que, Pfizer et Moderna, c’est la même chose, c’est comme le Dafalgan et l’Efferalgan, seul l’emballage change », assure-t-il.

« Vaccins jumeaux »

Un petit vent de panique souffle depuis que le Pfizer se fait plus rare dans les centres et les questions affluent : un rappel en Moderna est-il bien sans risque après une primovaccination en Pfizer ? Ce schéma est-il plus efficace ? Les deux vaccins sont-ils bien interchangeables ?

« Il n’est pas abusif de dire que Moderna et Pfizer sont des vaccins jumeaux. Ils reposent sur la même technologie, on dit qu’ils ont la même plate-forme vaccinale : de l’ARN messager encapsulé avec des lipides qui provoque une réponse immunitaire dirigée contre la protéine spike », tranche Dominique Deplanque, président de la Société française de pharmacologie et de thérapeutique. Malgré des processus d’évaluation et des stratégies de surveillance différenciés, « il était implicite qu’on permette leur substitution à un moment, on aurait d’ailleurs pu le faire plus tôt », insiste le professeur de pharmacologie médicale à la faculté de médecine de Lille.