Santé
Santé / la France suspend à titre préventif l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca
Publié
4 ans depuissur
Par
Admin 2La décision, prise par Emmanuel Macron, a été annoncée après la suspension du vaccin en Allemagne et en Italie, et en attendant un avis sanitaire européen prévu mardi. Jusqu’à présent, les autorités sanitaires reconnaissent qu’il n’y a aucun lien avéré entre l’apparition de caillots sanguins et ce vaccin, à part l’enchaînement chronologique.
La France va suspendre l’utilisation du vaccin d’Astrazeneca contre le Covid-19 à titre préventif, jusqu’à ce qu’un avis européen soit émis mardi, a annoncé, lundi 15 mars, Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat suit ainsi l’exemple de plusieurs autres pays européens, dont l’Allemagne et l’Italie, qui ont constaté des effets secondaires, notamment l’apparition de caillots sanguins, chez des personnes vaccinées.
Depuis une semaine, il se passe rarement une journée sans qu’un pays ne suspende tout ou partie du vaccin d’AstraZeneca en circulation. L’Autriche a lancé le mouvement le 8 mars, en interrompant l’utilisation d’un lot de vaccins, après la mort d’une infirmière. Depuis, d’autres pays ont suivi. Le Danemark, la Norvège, l’Islande ou encore les Pays-Bas sont allés plus loin en gelant tous les lots du vaccin d’AstraZeneca, suivis par l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Hors d’Europe, la République démocratique du Congo, l’Indonésie et la Thaïlande ont reporté leur campagne de vaccination.
Chaque fois, les autorités sanitaires réagissent à des cas où des personnes vaccinées ont développé des problèmes sanguins parfois mortels, soit des difficultés à coaguler, soit la formation de caillots sanguins (thrombose). Mais les autorités concernées le reconnaissent : il n’y a pour l’instant aucun lien avéré entre les problèmes de santé susmentionnés et le vaccin d’AstraZeneca, mis à part l’enchaînement chronologique. Si ce dernier est suspendu, c’est à titre préventif, le temps de s’assurer qu’un tel rapport n’existe pas.
M. Macron a espéré que la vaccination avec le produit d’AstraZeneca reprenne vite « si l’avis de l’autorité européenne le permet ». Dans un premier temps, le président français a indiqué que l’AEM devait rendre mardi après-midi un avis sur le recours à ce vaccin. Mais l’entourage du chef de l’Etat Macron juge « probable » que la suspension de l’usage de l’AstraZeneca soit étendue jusqu’à jeudi, date à laquelle l’EMA doit se réunir.
Le comité de sécurité de l’AEM « examinera plus en détail les informations demain [mardi], et a convoqué une réunion extraordinaire le jeudi 18 mars pour statuer quant aux informations recueillies et à toute autre mesure qui pourrait s’avérer nécessaire », a ainsi déclaré à Amsterdam le régulateur européen, par voie de communiqué. Il ajoute que les avantages du vaccin dans la prévention du Covid-19 l’emportent sur les risques d’effets secondaires.
L’agence avait précédemment déclaré enquêter sur un « certain nombre » de cas de caillots sanguins chez des personnes ayant reçu le vaccin, tout en assurant qu’il pouvait continuer à être utilisé.
Dans un communiqué publié lundi, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) souligne que les « événements thromboemboliques et de troubles de la coagulation » sont « rares » et qu’à ce stade rien n’indique qu’ils ont un lien avec la vaccination. « A ce jour, peu de cas ont été signalés en France, dont aucun cas de décès, dans le cadre de la surveillance renforcée mise en place depuis le début de la vaccination », précise l’agence.
Lors d’un entretien sur la plate-forme Twitch, le premier ministre, Jean Castex, avait estimé dimanche qu’il fallait avoir « confiance » dans le vaccin d’AstraZeneca. « Sinon on aura des retards dans la vaccination, les Françaises et Français seront moins protégés et la crise sanitaire durera longtemps », avait-il argumenté. De son côté, le ministre de la santé, Olivier Véran, avait estimé jeudi que le risque de caillots sanguins n’était statistiquement pas plus fort chez les patients vaccinés avec AstraZeneca que chez les autres. Pour autant, avait-il ajouté, « chaque dossier est analysé » pour déterminer s’il existe « un lien de causalité ».
Lundi, sept Etats européens (Allemagne, France, Italie, Slovénie, Espagne, Portugal et Lettonie) ont allongé la liste des pays ayant suspendu par précaution l’administration du vaccin.
L’Allemagne, où le gouvernement, qui défendait encore le vaccin suédo-britannique il y a quelques jours, a créé la surprise lundi avec l’annonce par le ministre de la santé, Jens Spahn, de la suspension des injections. L’institut médical Paul-Ehrlich, qui conseille le gouvernement, « estime que d’autres examens [sont] nécessaires », après des cas de formation de caillots sanguins chez des personnes vaccinées en Europe.
Berlin a fait état de sept cas répertoriés dans le pays, lesquels sont « liés à des thromboses de veines cérébrales » – sur plus de 1,6 million d’injections pratiquées dans le pays, a précisé Jens Spahn. « Le risque est très faible, a souligné le ministre. Mais si ces cas devaient être en lien avec la vaccination, il s’agirait d’un risque supérieur à la moyenne. » Cette annonce tombe au plus mal en Allemagne, où les vaccinations patinent déjà et où les autorités sanitaires prédisent pour les prochaines semaines une violente troisième vague provoquée par le variant dit britannique.
L’Italie, qui avait déjà suspendu la semaine dernière plusieurs lots isolés du vaccin, a également décidé lundi de suspendre son utilisation de façon préventive et temporaire « dans l’attente d’une décision » de l’AEM, tout comme l’Espagne, le Portugal, la Slovénie et la Lettonie.
En dehors de l’Europe, le Venezuela a décidé de ne pas autoriser le vaccin AstraZeneca sur son territoire « en raison des complications » sur des patients vaccinés, a annoncé la vice-présidente Delcy Rodriguez. Le pays avait pourtant réservé entre 1,4 et 2,4 millions de doses d’AstraZeneca à travers le dispositif Covax créé par l’OMS au bénéfice des pays les plus démunis.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a recommandé lundi de continuer à vacciner avec le produit d’AstraZeneca, avant la réunion mardi de son groupe d’experts pour étudier la sûreté du vaccin. « Nous ne voulons pas que les gens paniquent et, pour le moment, nous recommandons que les pays continuent de vacciner avec AstraZeneca », a déclaré la chef scientifique de l’OMS, Soumya Swaminathan, au cours d’une conférence de presse à Genève.
La docteure Mariangela Simao, sous-directrice générale de l’OMS chargée de l’accès aux médicaments et aux produits de santé, a ajouté que, à ce stade, le bénéfice de la vaccination l’emportait sur les risques liés au Covid-19. « D’après ce que nous avons vu jusqu’à présent dans les données préliminaires, il n’y a pas d’augmentation du nombre des cas d’événements thromboemboliques », a-t-elle ajouté.
Le vaccin d’AstraZeneca est sûr, a assuré, lundi, son codéveloppeur face aux inquiétudes grandissantes. Il y a « des preuves très rassurantes qu’il n’y a pas d’augmentation du phénomène [de formation] de caillots sanguins ici au Royaume-Uni, où la plupart des doses en Europe ont été administrées jusqu’à présent », a déclaré, à la BBC, le professeur Andrew Pollard, directeur du Oxford Vaccine Group qui a développé le vaccin avec AstraZeneca. Il a souligné l’importance de poursuivre la vaccination contre le Covid-19, maladie qui présente un « énorme risque » pour la santé.
Dans un communiqué publié dimanche, AstraZeneca a mis en lumière le fait qu’« environ 17 millions de personnes dans l’Union européenne et au Royaume-Uni ont maintenant reçu [le] vaccin, et le nombre de cas de caillots sanguins signalés dans ce groupe est inférieur aux centaines de cas auxquels on pourrait s’attendre dans la population générale ». L’examen de ces données « n’a apporté aucune preuve d’un risque accru d’embolie pulmonaire, thrombose veineuse profonde ou de thrombocytopénie ».