Face à la proportion toujours grandissante des avortements clandestins, Mme Marie Edi, une sage-femme diplômée d’Etat depuis au moins 30 ans, apporte des éclairages sur leurs conséquences. Interview.
Un avortement est l’expulsion d’un fœtus/embryon hors de la cavité utérine. Cela peut être spontané, soit par une déficience en progestérone (une hormone féminine qui sert à préparer l’utérus pour une grossesse), ou encore dû à un problème psychologique de la patiente.
L’avortement peut aussi être fait de façon volontaire/provoqué. On parle dans ce cas d’Interruption Volontaire de la Grossesse (IVG). On parle d’avortement clandestin quand cela est fait « en cachette », avec ou souvent même, sans le consentement de l’auteur de la grossesse.
Cet acte peut entraîner la mort par hémorragie de la patiente, la perforation de l’utérus, une infection avec une septicémie (infection généralisée de l’organisme associée à une inflammation grave) parce que les concernées prennent de médicaments non prescrits ou des médicaments/mixtures traditionnels, sans connaître le dosage. Elles s’empoisonnent, s’infectent et cela peut entraîner la mort. Cet acte peut aussi être fait dans des conditions d’hygiène médicales (dans des arrière-boutiques ou des pseudo-cliniques) qui laissent à désirer …
En Côte d’Ivoire, le taux de mortalité maternelle est de 614 décès pour 100 000 naissances vivantes dont une part (18%) relève des complications de l’avortement clandestin.
Ces traitements, pour rattraper les dégâts causés par ces avortements clandestins, ont bien évidemment un lourd budget puisqu’il faut soigner jusqu’à la guérison complète de la patiente.
Aujourd’hui, il y a beaucoup de grossesses précoces, c’est-à-dire, avant l’âge de 18 ans. Aussi, quand une jeune fille est en âge de procréer et a des études à faire, il faut lui dire de « fermer les jambes et ouvrir les cahiers » et que lorsqu’elle sera prête à se marier, elle fera ses enfants. A défaut, il faut leur montrer les méthodes contraceptives/précautions à prendre, c’est-à-dire, soit elles peuvent se mettre sous la pilule, utiliser les préservatifs, faire l’injection ou poser l’implant afin d’attendre le moment opportun pour pouvoir procréer. On ne peut empêcher une jeune fille de faire ses enfants, mais il y a des méthodes pour éviter de prendre des grossesses indésirées et ensuite aller faire des avortements.
Donc, que ces filles s’abstiennent ou à défaut, utilisent les méthodes contraceptives. Sinon, à la longue, à force de « racler » l’appareil génital, elles deviennent stériles lorsqu’elles sont dans leur foyer. Les avortements font beaucoup de drames dans notre société.
En amont, il faut que les parents aient une oreille attentive avec leur enfant, être leur confident, afin d’éviter ces drames. Les parents sont les premiers conseillers de la famille: ils doivent communiquer/échanger sur la sexualité, dans les normes, avec leurs enfants.
Une grossesse doit être désirée, afin d’éviter de se faire du mal, car il y a un poids psychologique et économique qui entrent un jeu… Cependant, il y a des cas de grossesse où il y a la contrainte de “faire passer”. Ce sont les grossesses issues par exemple, de viols, d’hémorragie (avec œuf clair), d’inceste, qui agit sur santé de la mère ou de l’enfant, etc. Pour ces cas, il faut se rendre dans un centre agréé pour faire passer cette grossesse par un gynécologue, SEUL spécialiste habilité à le faire, ce qui rend le caractère médical et sécurisé de cet acte. Mais cela se fait après un sérieux counseling (un échange attentif) et avec les preuves du sinistre. Ces spécialistes le font avec beaucoup de précautions qui permettront à la patiente d’enfanter sans problème plus tard.
Surtout, n’oublions pas qu’un bébé est une grâce de Dieu et l’avenir d’une société. Evitons donc d’arriver au pire avec ces avortements clandestins et leurs lots de conséquences, car une vie humaine doit être préservée, car elle n’a pas de prix.
Interview réalisée par Tra Lou Sonia
Source : AIP