L’avortement n’est pas légalisé mais plutôt désormais encadré en République du Bénin à travers la loi votée la semaine dernière par les honorables députés à l’Assemblée nationale. Et, l’encadrement de l’avortement est une mesure de santé publique dont l’unique objectif est de sauver la vie. C’est du moins ce qu’on peut retenir de la déclaration des membres du gouvernement et de celui du porte-parole du gouvernement face aux professionnels des médias du Bénin. Avec des exemples concrets qui donnent matière à réflexion, le ministre de la santé a exposé les conséquences de l’avortement clandestin. D’où la nécessité pour ce gynécologue de sécuriser autrement la femme. Il s’agit pour lui, de la mettre davantage en confiance pour l’amener à mieux planifier sa vie. Pour Benjamin Hounkpatin, l’adoption de la loi relative à l’encadrement de l’avortement vient soulager les peines de nombreuses femmes qui, face à la détresse d’une grossesse non désirée, se trouvent dans l’obligation de mettre leur vie en jeu par des pratiques d’interruption de grossesse dans des conditions non sécurisées. Selon ses propos, « L’acte que la Représentation nationale vient de poser sera à coup sûr très bien accueilli par l’ensemble du personnel médical qui, au quotidien, est confronté à la prise en charge des complications d’avortements qui aboutissent souvent à des mutilations ou des pertes en vies humaines. Et ces pertes en vies humaines concernent souvent des femmes qui sont encore dans la fleur de l’âge ».
Benjamin Hounkpatin précise que « l’interruption volontaire de la grossesse restera comme un dernier recours ». Il rassure ensuite que le Gouvernement poursuivra le travail sur le renforcement de la prévention des grossesses non désirées à travers les ressorts tels que l’éducation de base, les efforts de communication sur la sexualité, la disponibilité et la promotion des services de contraception, la promotion de l’éducation sexuelle intégrée dans les collèges et les universités et les efforts pour une parentalité responsable. Mieux, dit-il, des actions de communication sont programmées dans le but de vulgariser la loi afin que chacun puisse jouir pleinement de ces droits.
Pour rappel, la loi n°2021-12 modifiant et complétant la loi n°2003-04 du 03 mars 2003 relative à la santé sexuelle et la reproduction, adoptée à l’unanimité par les députés dans la nuit du mercredi 20 au jeudi 21 octobre 2021, loin d’être une apologie de l’avortement, le texte précise que l’IVG est autorisée, surtout lorsque la grossesse est susceptible d’aggraver ou d’occasionner une situation de détresse matérielle, éducationnelle, professionnelle ou morale incompatible avec l’intérêt de la femme et/ou de l’enfant à naître. Des propos fortement soutenus par les ministres de la justice, de la législation et des droits de l’homme et des affaires sociales et de la Microfinance. Pour le garde des sceaux Sévérin Quenum, l’avortement est toujours punissable en République du Bénin. Il a énuméré quand et pourquoi l’IVG est condamnable par la justice béninoise.
A en croire la ministre Véronique Tognifodé, il s’agit, en somme, de lois certes révolutionnaires, mais destinées uniquement à améliorer nos pratiques sociétales, surtout à l’égard de la femme. Selon ses propos, il est normal qu’elles soulèvent des passions et des incompréhensions de la part des conservateurs, mais il est indiqué d’aller au-delà de nos humeurs pour faire comprendre le bien-fondé de ces réformes qui ne visent nullement à déstructurer la société béninoise. Bien au contraire, précise-t-elle, ces réformes tendent à en consolider les bases en tenant compte des évolutions sociétales observées.
La santé sexuelle et reproductive est un levier social de première importance à prendre en compte pour la réduction de la mortalité maternelle et infantile. Au regard des données récentes sur le sujet, il s’est avéré important de procéder à une révision du dispositif législatif actuellement en vigueur. En effet, les enquêtes démographiques et de santé révèlent qu’il s’observe, de plus en plus, une précocité des rapports sexuels chez les jeunes femmes. Entre 2017 et 2018, la proportion de ces femmes ayant eu leurs premiers rapports sexuels avant l’âge de 18 ans est de 59%. Une telle situation, associée à l’absence ou à l’irrégularité de l’utilisation des méthodes contraceptives, explique les grossesses précoces et non-désirées qui conduisent souvent à des avortements clandestins, la plupart du temps, dans des conditions sanitaires inadéquates et non sécurisées. Ces pratiques font que les adolescentes représentent 20% des décès maternels enregistrés dans notre pays. Pour remédier à cette situation déplorable, la nouvelle loi modifiant la loi n°2003-04 du 3 mars 2003 relative à la santé sexuelle et à la reproduction est plus explicite en ce qui concerne l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Elle prévoit les cas exceptionnels dans lesquels elle peut être autorisée et les conditions requises pour les interventions y relatives, afin de réduire substantiellement les risques de décès.
La responsabilité du médecin pratiquant est également encadrée et un agrément sera requis pour les formations sanitaires susceptibles d’intervenir à cette fin. Ainsi, après le vote et la promulgation de ce texte, l’IVG sera autorisée sur prescription médicale ou à la demande de la femme, dans les conditions prévues par la loi. Ceci ne pourra, par exemple, jamais intervenir après la 12ème semaine d’aménorrhée.
Source : acotonou