Des témoignages publiés par Anna Toumazoff, militante féministe qui s’était fait connaître en 2019 en dénonçant les agressions vécues par des femmes lors de voyages en Uber.
«J’ai été violée.» «Ils m’ont traitée comme de la merde et ils ne m’ont pas crue.» «Tu m’as laissée pleurer dans tes bras, me parler de tes souffrances, et tu m’as violée.» Hier soir, la militante féministe Anna Toumazoff, qui s’était notamment fait connaître en 2019 en dénonçant les agressions vécues par des femmes lors de leurs trajets avec des chauffeurs Uber, a publié sur Twitter et Instagram toute une série de témoignages d’étudiantes d’Instituts d’études politiques (IEP) racontant les viols qu’elles auraient subis de la part d’autres élèves.
« Les IEP regorgent de violeurs, d’agresseurs et de harceleurs…»Juliette, étudiante à Sciences Po Toulouse
Tout commence le 4 février dernier: une enquête du journal Libération révèle qu’une dizaine d’étudiantes de l’IEP de Bordeaux racontent avoir été victimes d’agressions sexuelles ou de viols en accusant leur établissement de les avoir «abandonnées». Dans la foulée, Juliette, une étudiante de Sciences Po Toulouse publie une lettre ouverte sur le groupe Facebook de son école dans laquelle elle décrit également les viols dont elle aurait été victime. «Les IEP regorgent de violeurs, d’agresseurs et de harceleurs. Leur présence est confortée et favorisée par les événements de nos écoles (intégrations, campagnes pour les bureaux, CRIT…) et par l’omerta», accuse-t-elle, annonçant par la même occasion qu’elle a porté plainte samedi dernier.
Surprise par le nombre de messages
C’est après la publication de ce nouveau témoignage que la militante féministe Anna Toumazoff , diplômée de l’IEP de Toulouse, décide d’agir. «Comme j’ai un compte Instagram très suivi, j’ai invité toutes les filles étudiantes ou diplômées d’un IEP ayant subi un viol ou une agression à le raconter», témoigne la jeune femme. Immédiatement, elle reçoit «des centaines» de messages, provenant d’étudiantes venant de tous les Instituts d’études politiques de France. «J’ai été très surprise par le nombre de messages, mais surtout, par le fait que beaucoup de jeunes femmes racontent avoir été victimes de viols sans que leur école ne réagisse», explique l’activiste, qui publie ensuite anonymement les témoignages qu’elle reçoit sur son compte Instagram et sur Twitter.
Des réactions indignées
Des messages qui ont suscité de très nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. Plusieurs dizaines de milliers de tweets de soutien ont notamment été postés sur le mot-dièse #SciencesPorcs. Des personnalités du monde de l’enseignement supérieur, mais aussi, du monde de la politique ont fait savoir leur indignation à la lecture de ces témoignages.
Marlène Schiappa, ancienne secrétaire d’État en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes et désormais ministre de la Citoyenneté a affirmé son «plein soutien aux étudiantes victimes de viols qui dénoncent les faits courageusement».
«Nous allons traiter cette affaire»
Mis en cause par ces accusations, certains IEP ont d’ores et déjà réagi. Interrogé sur France 3 Occitanie, Olivier Brossard, le directeur de Sciences Po Toulouse, a dit accorder «une grande crédibilité au témoignage» de l’étudiante ayant écrit la lettre ouverte. «Nous allons traiter cette affaire et protéger les victimes (…) Il va y avoir une enquête judiciaire et la section disciplinaire de l’établissement va mener sa propre enquête (…) Nous devons voir si les faits sont avérés et quelle est leur ampleur», a-t-il également précisé.
« Les commentaires insinuent de manière diffamatoire que dans notre IEP régnerait le silence et la tolérance à l’endroit des violences sexistes et sexuelles»La direction de l’IEP Strasbourg
De son côté, la direction de l’IEP Strasbourg a aussi répondu aux accusations de certaines étudiantes à son encontre. «Les commentaires insinuent de manière diffamatoire que dans notre IEP régnerait le silence et la tolérance à l’endroit des violences sexistes et sexuelles. La direction est, au contraire, d’une très grande vigilance à l’endroit de toutes les formes de discrimination et de violence», commente l’école sur son compte Instagram.
Ces accusations surviennent quelques semaines après la publication du livre de Camille Kouchner «La familia grande», accusant le politologue Olivier Duhamel d’inceste. Des accusations qui avaient fragilisé la direction de Sciences Po Paris, dans laquelle ce dernier exerçait la fonction de président au sein de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP). Frédérique Mion, le directeur de la grande école, qui avait été mis au courant des rumeurs concernant le politologue en 2019, n’avait «pas réagi». Les syndicats étudiants avaient réclamé – et ne l’avaient pas obtenu – sa démission, l’accusant de «trahison».
Source : etudiant.lefigaro