L’IEP est en proie à un vif conflit depuis l’affichage, jeudi 4 mars, des noms de deux professeurs accusés d’islamophobie.
Les propos d’un des deux professeurs accusé d’islamophobie à Sciences Po Grenoble étaient «extrêmement problématiques», a estimé mercredi dans un entretien à l’AFP la directrice de l’établissement, qui «condamne très clairement» les affiches dont les deux enseignants ont fait l’objet.
L’IEP est en proie à un vif conflit depuis l’affichage, jeudi 4 mars, des noms de deux professeurs accusés d’islamophobie, des «injures» pour lesquelles une enquête judiciaire a été ouverte sur signalement de l’établissement. «Ces affiches mettent en danger non seulement la vie des deux collègues», a expliqué mercredi à l’AFP Sabine Saurugger, la directrice de l’IEP, «mais également l’ensemble des communautés étudiantes, enseignantes, personnel administratif».
À l’origine de ces accusations notamment, un échange de mails véhément sur la notion d’islamophobie, en novembre et décembre dernier, entre un professeur d’allemand, dont le nom a été mentionné sur les affiches, et une historienne. Ce professeur d’allemand écrit notamment, dans des extraits qu’il a lui-même publié un temps sur son site internet, qu’il «n’aime pas beaucoup cette religion» qui lui fait parfois «franchement peur», «comme elle fait peur à beaucoup de Français».
«La liberté académique est un principe qui est central pour Sciences Po Grenoble»
Il y conteste la présence du mot islamophobie dans un groupe de travail intitulé «racisme, islamophobie, antisémitisme», voyant dans cette notion la «persécution (imaginaire) des extrémistes musulmans (et autres musulmans égarés)», avant de reconnaître dans un mail d’excuses s’être «par moments laissé emporter» dans ces échanges.
«Je pense qu’il y a un ton qui est extrêmement problématique dans ses propos, avec des idées qui sont développées parfois un peu rapidement, et donc un rappel à l’ordre et une incitation au dialogue ont été entreprises», par la direction, a expliqué Mme Saurugger.
«La liberté académique est un principe qui est central pour Sciences Po Grenoble», poursuit la directrice, «et lorsque cette liberté académique commence à atteindre des limites qui sont définies par un cadre réglementaire, dans ce cas-là, la directrice doit intervenir, et est intervenue avec un rappel à l’ordre».
«Depuis l’assassinat de Samuel Paty, nous sommes dans une situation qui est grave»
D’autre part, un cours du second enseignant, maître de conférences en Sciences politiques, a fait l’objet le 22 février d’un appel à témoignage «très problématique» de la part du principal syndicat étudiant de l’IEP, selon la directrice. L’Union syndicale Sciences Po Grenoble expliquait notamment qu’il réclamait le retrait de cet enseignement «des maquettes pédagogiques pour l’année prochaine si lors de ce cours des propos islamophobes y étaient dispensés comme scientifiques».
«Nous devons savoir qu’aujourd’hui, et depuis l’assassinat de Samuel Paty, nous sommes dans une situation qui est grave, et qui peut être potentiellement dangereuse pour quelqu’un qui est accusé d’islamophobie sur les réseaux», poursuit Sabine Saurugger, professeur des universités en science politique. En raison de cet appel à témoignage, ce professeur avait demandé aux étudiants de ce syndicat «de quitter immédiatement (ses) cours et de ne jamais y remettre les pieds», selon un mail dont l’AFP a obtenue copie.
La directrice «appelle à un apaisement»
Cette demande est «clairement discriminatoire» pour Mme Saurugger, malgré la décision, par le procureur de Grenoble, de classer sans suite la plainte pour discrimination syndicale déposée le 27 février par l’Union syndicale. Visiblement éprouvée par plusieurs jours de polémique, Sabine Saurugger «appelle à un apaisement» et «un dialogue» avec étudiants et enseignants pour «reconstruire» Sciences Po Grenoble car, «d’une certaine manière, la survie d’un établissement est en jeu».
«La directrice commente des choses, moi je ne me fie pas à ces commentaires, ni qui que se soit, je me fie à l’Inspection générale», a commenté dans la foulée sur BFMTV Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, en référence à la mission d’inspection diligentée par son ministère. Sur le fond de l’affaire elle a dit regretter l’attitude du syndicat étudiant dont elle estime que le rôle est «d’être dans la médiation, pas de jeter les gens en pâture sur les réseaux sociaux».
Source : etudiant.lefigaro