Cette réforme concernera les étudiants qui entreront en master 1 à la rentrée prochaine.
C’est la grande nouveauté. À partir de 2022, les étudiants qui se destinent au métier d’enseignant, du premier comme du second degré, passeront le concours au bout de cinq années d’études au lieu de quatre. Un arrêté publié le 29 janvier dernier en précise les modalités.
Le site du ministère de l’Éducation nationale stipule qu’aujourd’hui «50 % des lauréats des concours sont issus d’un master M1 Meef (masters métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) et 50 % d’un M2 disciplinaire». Et, ajoute le ministère, «placer le concours en fin de M2 permettra, sans réduire la diversité de formation, d’égaliser les conditions de passage entre ces deux catégories de candidats». Pascale Ponté, responsable pédagogique et directrice des études à l’université de Cergy-Pontoise, voit dans ces deux années de formation le moyen d’étaler l’enseignement des disciplines sur un temps plus long.«On sera dans une logique de progressivité comme on aura une durée d’études plus importante qu’actuellement», assure-t-elle.
Une réforme qui ne fait pas que des heureux
Autre changement de taille, un entretien de motivation, non disciplinaire, va notamment se substituer à l’un des deux oraux d’admission du Capes, jusque-là concentrés sur la discipline choisie par le candidat.
Le statut des futurs enseignants va également évoluer.«Ils étaient jusqu’à présent fonctionnaires stagiaires (payés 1.400 euros net par mois) en M2. Après la réforme, ils seront en M2, pour certains en alternance, quand d’autres effectueront un stage d’observation, en accompagnement d’un professeur en poste», explique Pascale Ponté.
En alternance, les futurs enseignants recevront une gratification correspondant au nombre d’heures effectuées, variant entre 600 et 900 euros. Une réforme qui ne fait pas que des heureux. «Le master sera uniquement là pour servir à préparer un concours. Or notre priorité, c’est d’abord de former de bons enseignants», déplore Sylvain Doussot, formateur en didactique de l’histoire, responsable du master Meef premier degré de la faculté de Nantes. «Les choses sont faites à l’envers en mettant le concours au bout de la formation, alors que les ingénieurs ou les médecins passent d’abord le concours puis suivent une formation. Il faudrait mettre un concours à la fin de la licence pour les former ensuite au métier», suggère-t-il.
Une baisse de revenu
D’autres estiment que l’oral nouvelle mouture pourrait contribuer à une baisse du niveau des enseignants dans leur discipline. «Cette année, je passe des oraux en espagnol alors que si je rate le concours et que je le repasse selon les nouvelles modalités, je vais devoir expliquer en français en quoi je vais être une bonne fonctionnaire. On va donc moins juger mes compétences linguistiques alors que, face aux élèves, je devrai parler en espagnol», s’inquiète Lucie Barreteau, en M1 Meef second degré, parcours espagnol, à Nantes.
Les M2 en alternance devront jongler avec le travail en classe, la préparation du concours et l’obtention du master 2. «Ils n’auront plus de temps pour travailler sur le plan de la formation réellement professionnelle, c’est-à-dire le développement d’outils et de concepts pour analyser ce qui se passe dans leur classe», redoute Sylvain Doussot.
Enfin, la baisse de revenu réelle est difficile à vivre, surtout pour ceux en reconversion comme Marine Lecoanet. «J’ai une enfant à charge et je peux me permettre de toucher 1.500 euros sur l’année de M2, mais je ne peux pas toucher moins», alerte-t-elle. Or les candidats en reconversion représentent environ 28 % des admis dans le premier degré et 16 % dans le second.
Source : etudiant.lefigaro