Les jeunes s’estiment lésés et ressentent de plus en plus d’incertitude quant à leur avenir.
Cours en distanciel, isolement et désormais un couvre-feu qui va encore réduire les opportunités de petits boulots: les étudiants ont le sentiment désagréable d’être «les grands perdants» après les annonces du président Macron mercredi.
Privés de cours durant six mois, les 2,8 millions d’étudiants ont repris le chemin de l’université en septembre en espérant retrouver un semblant de normalité. Mais très rapidement les mesures les concernant ont commencé à tomber.
Début octobre, le gouvernement a instauré la réduction de moitié de la jauge dans l’enseignement supérieur, l’un des principaux clusters en France. Les étudiants vont depuis en cours la moitié du temps et sont en distanciel pour le reste.
«À ce sentiment d’isolement s’ajoute celui de l’incertitude face à l’avenir. Les perspectives sont tout sauf claires, le lien avec le milieu professionnel pour effectuer des stages par exemple est difficile. Une couche supplémentaire qui pèse sur les étudiants», estime Monique Ronzeau, présidente de l’Observatoire national de la vie étudiante.
«Le couvre-feu, c’est le dernier clou sur le cercueil»Un étudiant
Mercredi soir, l’annonce du couvre-feu à 21H00 a résonné comme «la goutte de trop» pour bon nombre d’étudiants.
«L’arrivée dans l’enseignement supérieur est devenue extrêmement difficile. Plus on avance dans la crise, plus c’est dur», estime Paul Mayaux, président de la Fage.
Il pointe la «précarité forte». «Nos épiceries solidaires pour faire face à la précarité étudiante (Agorae) n’ont jamais reçu autant de monde (…) et des centaines de jeunes dorment dans des campings», s’alarme-t-il.
«On prend un peu cher depuis un moment»
Même constat du côté de l’Unef, autre syndicat. «La mesure du couvre-feu est certes nécessaire mais elle va aggraver la situation des étudiants qui est déjà très explosive, il y a urgence à prendre des mesures structurelles», lance sa présidente Mélanie Luce.
«On peut dire +c’est dur d’avoir 20 ans en 2020+ mais si derrière ce n’est pas suivi d’effet, ça ne sert à rien», lance-t-elle en s’appuyant sur le discours d’Emmanuel Macron.
Les problèmes concernent également les «jobs», qui constituent une part importante de leurs revenus. Seulement 15% des étudiants travaillent en parallèle de leurs études dans des domaines en lien direct avec leur formation, les autres font un travail alimentaire, selon l’Unef.
«Parmi ces petits jobs, beaucoup sont dans la restauration, le soir, ou encore font des babysitting en soirée aussi donc ils sont directement pénalisés avec l’instauration de ce couvre-feu», décrit Mélanie Luce.
C’est le cas d’Agathe, étudiante en première année de licence de droit à Montpellier qui s’attend à «l’annulation de toutes (s)es soirées de babysitting». «Je gardais des enfants une ou deux fois par semaine pendant que les parents sortaient au restaurant. Ça sera autant d’argent en moins pour moi. J’espère que ça ne va pas durer», se désole-t-elle.
L’une des seules solutions consistera à «travailler en journée les samedi ou dimanche ou encore de prendre sur leurs heures de cours la semaine et c’est malheureusement cette dernière option qu’ils doivent choisir par dépit», regrette Mélanie Luce.
«En tant qu’étudiant, on a l’impression qu’on renvoie la responsabilité de la crise aux jeunes qui vont boire des coups. Il y a ce sentiment que c’est toujours la faute des jeunes», déplore Antoine, étudiant en master 1 à Assas à Paris.
«On prend un peu cher depuis un moment avec toutes les mesures successives et on se demande si on ne pourrait pas trouver autre chose», ajoute l’étudiant pour qui l’annonce du couvre-feu, «c’est un peu le dernier clou sur le cercueil».
Source : etudiant.lefigaro