Complexes, les entretiens des trois meilleures écoles de commerce sont redoutés des candidats. Si le jury exige de la sincérité, une préparation s’impose.
«Je n’avais pas accès à l’eau chaude pendant le voyage, c’est cela qui m’a le plus marquée au Sénégal», voilà la réponse lunaire d’une candidate à l’oral de l’ESCP, se souvient Muriel Grandjean, responsable du département d’admissions. Une réplique révélatrice selon elle, d’un manque de prise de recul et d’analyse. Après les écrits, l’entrée en école de commerce est toujours conditionnée à la réussite d’oraux. Ceux des trois parisiennes sont particulièrement redoutés. La formule d’HEC s’avère la plus singulière. Les oraux durent trois jours, et contrairement à la plupart des écoles de commerce, aucun entretien de personnalité n’est prévu, seules comptent des épreuves académiques de culture, langues et matières spécifiques.
Les admissibles se soumettent aussi à la mythique épreuve du triptyque, «la plus redoutée», d’après Brice Rabourdin, directeur du développement des programmes d’HEC. Quel est l’intérêt des pistes cyclables? Faut-il interdire les partis d’extrême droite? Les élèves s’affrontent en endossant tour à tour le rôle de «convaincant», de «répondant» et d’«observateur». Le premier dispose de quinze minutes pour préparer le sujet attribué par le jury, qu’il expose durant cinq minutes puis défend sa position face au deuxième. Le troisième, lui, observe les deux débats et consigne ses remarques. «Les candidats doivent construire et mener un argumentaire, sans tomber dans la confrontation et en gardant le contrôle du temps», explique Brice Rabourdin. De cet oral, Alex, élève à HEC, a gardé un souvenir vif: «Je devais soutenir la thèse selon laquelle les Français travaillent suffisamment. Je passais l’examen un dimanche, donc je me suis permis un trait d’humour en soulignant que nous étions au travail en ce jour traditionnel de repos.»
À l’Essec, pas question de «revenir sur les compétences jugées à l’écrit», assure Marie-Noëlle Koebel, directrice des études. L’oral de motivation s’étale sur 45 minutes. «Le jeune doit savoir se livrer et exprimer ses opinions en toute authenticité, sans se créer de personnage», estime-t-elle. L’ESCP insiste sur la dimension internationale: «Les élèves ne peuvent pas rester plus de deux semestres consécutifs sur le même campus, donc il faut prouver son ouverture au monde et son adaptabilité», détaille Muriel Grandjean.
S’initier au storytelling
Pour Olivier Sarfati, directeur de MyPrepa, c’est le «storytelling», qui fait la différence, soit l’art de raconter sa vie. Pour chaque événement, il faut développer la genèse, les détails importants, les difficultés éprouvées, le dénouement et les leçons tirées. «Il ne faut pas hésiter à se différencier, un étudiant a évoqué sa passion pour l’escrime médiévale et les bois des pianos et a obtenu un 18 à l’Essec.» À HEC, Alex recommande ainsi d’assister aux oraux de camarades: «En se glissant dans la peau du jury, on comprend les attitudes ou paroles à proscrire et à l’inverse, ce qui attire l’attention.» Enfin, le candidat doit connaître l’école. Des informations sont disponibles sur le site ou aux portes ouvertes. «Inutile pour autant de débiter la brochure, cela demande plutôt de se l’approprier», prévient Marie-Noëlle Koebel.
Source : etudiant.lefigaro