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Côte d’Ivoire / Contribution A propos du retour de la dictée

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En tant que Coperniciens, ils nous invitent à révolutionner l’école. Coperniciens, nous pensons que toute décision d’abrogation ou d’amendement dans le fonctionnement du système éducatif devrait bénéficier de l’onction et de l’appui des experts ès qualité que sont les Inspecteurs d’Enseignement Primaire. En effet, dans leur formation, les IEP apprennent la Philosophie de l’éducation, la sociologie de l’éducation, la psychologie de l’éducation, la didactique générale, les didactiques spécifiques aux matières, la communication, l’anthropologie, la pédagogie et la linguistique. L’Inspecteur est un intellectuel compétent et complet. Du moins ceux qui sont formés et sortis diplômés de l’ENS.
Depuis ma prise de fonction en Octobre 1998, les IEP n’ont toujours pas été associés aux décisions. Ils les subissent plutôt. En effet, en Septembre 2016, convoqués à l’Hôtel Président de Yamoussoukro, l’on nous annonçait le ‘‘décès’’ de la Formation par Compétence (FPC) alors que nous n’en avions pas été informés de sa maladie. Avait-elle été victime d’un AVC aujourd’hui courant ? Sa remplaçante à nous présenter a été nommée APC qui devait être curieusement appliquée au titre de l’année scolaire en cours : 2016 – 2017. Avant notre arrivée à Yamoussoukro, nous avions reçu, en particulier moi, les manuels APC de l’année scolaire en cours que j’avais déjà distribués dans les écoles. Le séminaire de Yamoussoukro avait pour objectif d’apprécier à la fois la qualité et le contenu de ces manuels pourtant déjà distribués dans les écoles. Pouvait-on rejeter des manuels déjà édités à coût de milliards par les fournisseurs si les contenus ne rencontraient pas l’adhésion des IEP. Bien-sûr, ces manuels avaient comporté de très nombreuses coquilles qui avaient été même découvertes par des Instituteurs pointilleux. La fameuse APC a vécu le temps d’une rose : elle a titubé, glissé et est tombée. Les pédagogues sapeurs-pompiers sont allés la réanimer. A son réveil, elle a été recadrée puis re-recadrée. Malheureusement un coma sans pitié l’a envoyé ad patres. Je n’oublie pas de dire qu’aux funérailles de la Formation par Compétence (FPC) l’on nous avait distribué des clés USB qui contenaient la carte d’Identité de la nouvelle venue, son CV et son fonctionnement. En circonscription, l’Inspecteur devait tirer tous les documents compilés pour son propre compte, de la maternelle au CM2. Imaginez l’incidence financière que cette opération emporterait. En outre, chaque conseiller de secteur devait à son tour photocopier chacune des feuilles de ce volumineux document pour lui-même et pour tous les Instituteurs de son secteur pédagogique. Des maîtres y avaient opposé un refus catégorique de mettre la main à la poche. C’était le présage d’une courte vie. De nos jours, l’APC a fait place à une autre méthode qui n’est pas nouvelle car c’est par elle que nous avons été formés dans les années 1970 aux cours préparatoires. Pourquoi donc ce tango pédagogique ? La pédagogie serait-elle une banquise en perpétuelle déroute ? Après ce coup de cœur, je voudrais maintenant aborder le problème du retour de la dictée à l’école qui suscite beaucoup d’intérêts.

En effet, ainsi que je l’avais précédemment signifié dans une publication, c’est le Ministre Amani qui avait sonné le glas de la dictée à Toukouzou Hozalem dans une déclaration en fin de journée après une prière que l’Eglise Papa Nouveau organise chaque année en faveur de l’école. J’avais personnellement salué cette annonce car la dictée avait fait beaucoup de victimes parmi mes camarades de classe au concours d’entrée en Sixième en 1976. Ce concours avait lieu dans la deuxième semaine du mois de Mai et le CEPE prenait le relais en Juin. En prenant l’option de donner ma position sur le retour de la dictée sonore, j’avoue n’avoir sollicité ni l’aval de ma corporation ni celui du service dans lequel j’exerce qui est la coordination du primaire de l’Inspection générale qui a la charge des enseignements du primaire. J’assume ma qualité et prêt à endosser les conséquences qui en découleraient.
Pour traduire cette position, je m’adresserai d’abord aux concitoyens lambda, c’est-à-dire non pédagogues. En effet il existe des ethnies qui ne comportent pas certaines lettres de l’alphabet. Cependant celles-ci sont remplacées par d’autres. Ainsi, chez moi, dans le Sud-ouest, la lettre ‘‘a’’ en tant que préposition se prononce correctement. Exemple : « mon fils est à l’école».
Cependant quand elle n’a pas ce statut et est contenue dans une syllabe, elle est prononcée ‘‘an’’. Ainsi le mot ‘‘vacances’’ se dira ‘‘vancances’’. Dans une région où j’avais été en villégiature, la lettre ‘‘R’’ est remplacée par le son ‘‘WL’’. là-bas le mot ‘‘route’’ se dit ‘’wloute’’. En Moré chez mes beaux-parents Mossi, la lettre R est remplacée par la lettre L. Ainsi le verbe ‘‘Arriver’’ se dit ‘‘alliver’’. Au pays de la Terranga, la lettre V est prononcée ‘‘W’’. le Wolof dira «il wa wenir » comme pour signifier : «il va venir». Au Cameroun, chez les Doualla et les Bantou, le son ‘‘IN’’ n’existe pas. Il est prononcé ‘‘UN’’. Ainsi on dira par exemple «va acheter du pun», « donne-moi ta mun », pour signifier le pain et la main. Même en France dans le Finistère, en haute-savoie ou même dans le Midi et surtout dans la région Parisienne qui a pour ethnie le «Fran», ces interférences linguistiques ou langagière existent. Dans une région forestière riveraine d’Abidjan, un originaire né au village, de père et de mère de cette même ethnie, qui a fait tout le cycle primaire au village, qui parle correctement son ethnie sans y truffer un petit mot Français, qui en a épousé tous les tics du parler, le poème suivant : « le corbeau et le renard : maître corbeau sur un arbre perché tenait en son bec un très gros fromage» se dira ainsi «le cobeau et le ena : maîte cobeau su un abe péché tenait en son bec un tès gos fomage ». A l’école primaire, l’enfant est enseigné par un seul maître. En situation d’examen, dans sa salle, il a deux examinateurs : l’un lit le texte de la dictée pour que les enfants s’en imprègnent et le deuxième dicte le texte et les enfants l’écrivent. Admettons que les deux surveillants soient l’un Mossi et l’autre Wolof. Appréciez les dégâts.
A l’école primaire de Grabo, mon ami Toh Kapet Julien, candidat de la deuxième série avait été recalé à un point en raison de la mauvaise prononciation d’un mot par le surveillant lecteur. Il avait obtenu 129 points.


Maintenant permettez-moi d’expliquer le concept ou la notion de dictée.

En effet la règle pédagogique dit qu’après avoir enseigné trois ou quatre notions dans les matières suivantes : Grammaire, Conjugaison et Orthographe, en plus des contrôles qui sont spécifiques à chacune d’elle, le maître doit concevoir un petit texte qui contiendra toutes les difficultés étudiées. La dictée est donc le contrôle des difficultés tirées des trois matières sus-indiquées. En tant que contrô le, la dictée n’a forcément pas besoin d’être faite de manière sonore. Lue sonorement peut être préjudiciable à l’enfant. La forme la mieux indiquée est un texte qui contienne des mots correctement ou mal écrits mais mis en gras dans un texte. Il est interdit aux deux surveillants de lire ce texte. L’enfant en fait une lecture silencieuse. Il découvre le mot mal écrit et rétablit la vraie orthographe s’il le faut. Cette forme de contrôle s’appelle « la mise au net » que les organisateurs de concours de la Fonction Publique ont toujours utilisée. Nous leur avons emboîté le pas, il y a cinq ans. Pourquoi donc retourner encore à la dictée sonore ? En omettant de mentionner le mot « dictée » sur l’emploi du temps depuis des années, la Direction de la pédagogie ne s’est point fourvoyée car tout enseignement doit être évalué. L’Instituteur l’a appris depuis le CAFOP. La dictée suppose des enseignements préalables. En principe, après le cycle du nombre de notions règlementaires enseignées, le maître doit absolument utiliser une des trois séances (Grammaire, Conjugaison, Orthographe) pour préparer à la dictée : cette séance s’appelle la dictée préparée. C’est une séance de contrôle et de renforcement des difficultés constatées par le maître à la faveur des exercices spécifiques. Une semaine plus tard, il choisit encore une autre séance pour faire la dictée de contrôle. Malheureusement force est de reconnaitre que parce que le mot «dictée» n’est pas porté sur l’emploi du temps, les Instituteurs en font royalement fi. La dictée n’est pas la seule à être négligée par les maîtres, il y a aussi le langage. Au départ le langage était constitué de 12 séances. Il me semble qu’elles sont portées maintenant à 9. Les séances finales comprenaient la fixation qui portait sur trois séances. La fixation est une séance d’acquisition mécanique : le maître veille à la prononciation et au rythme de la lecture du mot ou du groupe de mots comme par exemple : « c’est urgent ». La liaison entre ‘‘c’est’’ et ‘‘urgent’’ est absolument nécessaire. Quand cette séance d’acquisition mécanique et/ou systématique est terminée, il y a la phase la plus importante appelée « les exercices structuraux ». Si en fixation, le maître attend que l’enfant réussisse la prononciation, en exercices structuraux, la règle est que l’enfant doit répondre spontanément aux questions du maître. La séance est très rapide et si le maître est bon, elle devient ludique. Quand un élève réussit son tour, le maître revient sur le fautif. Il continue son cours en faisant la navette entre les bons et les mauvais élèves. Malheureusement la mention « exercices structuraux » a également disparu des emplois de temps et des Instituteurs, surtout les nouveaux n’en n’ont jamais entendu parler. Le langage facilite l’élocution : il enseigne les nouveaux mots de vocabulaire et les groupes de mots. Quand ‘‘la dictée’’ en tant que mise au net et exercices structuraux se pratiquent aisément dans une classe, le résultat est que l’enfant réussit bien ses devoirs de rédactions. C’est bien ce que les parents attendent en disant que seule la dictée permet une meilleure expression en français. Le nouvel emploi de temps accorde cette année de l’importance au Français. Merci à Madame Le Ministre. Mais pour que son objectif soit atteint, il faut absolument que les Conseillers Pédagogiques qui ne sont plus nommés mais formés à l’Ecole Normale Supérieure soient plus vigilants pour exploiter les formations Pédagogiques en secteur tous les compartiments non révélés par l’emploi de temps des matières. C’est à ce seul prix que notre école réussira son pari.
Je signe mon propos en disant à ma cadette du lycée de Sassandra que c’est pour elle que j’ai repris du service en publiant des contributions. La pertinence de certains de mes textes a fait de moi un rebelle dont la conséquence a été de me promener sur toute l’étendue de la Côte d’Ivoire. Neuf mutations en vingt ans : Daloa, Zouhan Hounien, Lakota, Yopougon, Assueffri, Tanda, Danané, Alépé et Gohitafla. Imaginez le préjudice financier que ces déplacements non remboursés par l’Etat m’ont causé. En domiciliant ma famille à Abidjan pour me promener seul dans les inspections, imaginez le préjudice que cela a causé à ma progéniture : non encadrement de mes enfants doublé d’une difficulté conjugale. Tous les Caïmans du Lycée de Sassandra en activité ou à la retraite me demandent, Madame Le Ministre et chère cadette, de ne pas vous laisser être étrangère dans le délicat département que vous gérez aujourd’hui. Le conseil de l’heure que je vous donne consiste à ce que les réalités pédagogiques qui vont vous aider à cerner la moralité et la psychologie de votre cercle relationnel professionnel ne se trouvent ni au 28ème étage, ni dans les directions centrales, mais dans les écoles et les circonscriptions, dans les sous-sols et rez-de-chaussée de la tour D.

Source : l’intelligent

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